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mercredi 20 mai 2020

Le renouveau du fret par la voie d'eau


En tant qu'habitants des fleuves, nous nous sentons concernés par la voie d'eau, c'est bien naturel. Alors nous nous sommes penchés sur le transport fluvial, hélas trop méconnu en France, et pourtant!
Le transport fluvial est le plus ancien moyen de transport au monde. 
Depuis le Moyen-Âge, il est la cause des choix d'implantation et l'extension de grandes villes, celles baignées par des fleuves, comme Lyon. 
C'est aussi grâce au transport fluvial, par la création des "chemins de halage" à l'époque où la motorisation n'existait pas, que nous avons un accès facile aux berges des fleuves.
La voie fluviale, ce moyen de transport historique a été petit à petit délaissé au profit du transport par camions et ferroviaire. 
Serait-ce temps aujourd'hui, de lui redonner sa juste place?
 
Le transport fluvial méconnu en France et pourtant...
Quoi de plus efficace pour des marchandises de gros tonnage comme les matériaux ou les céréales, qu'un bateau de gros gabarit (3 500 tonnes transportées), voire une simple péniche Freycinet (400 tonnes)! voir ici
Le transport fluvial représente 7,4 milliards de tonnes-kilomètres (t-km), soit environ 3,7% de l'ensemble du trafic terrestre national.
Le réseau fluvial en France de 8 500 km de voies d'eau navigables (fleuves et canaux), est le premier en Europe par sa longueur. Malgré cela, ce mode de transport est beaucoup moins développé en France que dans les autres pays d'Europe (Allemagne: 64 M t-km, Belgique 8,75 M t-km), Pays-Bas (45 M t-km). 


Cela est dû à la faiblesse des interconnexions entre les bassins fluviaux français et ceux de nos voisins. De nombreux projets ont été hélas abandonnés:
- le projet Rhin-Rhône, abandonné en juin 1997 par D. Voynet, Ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement de l'époque. 
- la liaison Seine-Est a fait l'objet d'études dans les années 1990, sans suite concrète.  
- la liaison Rhin-Danube avec le bassin Rhône-Saône n'a jamais vu le jour malgré les nombreux projets pourtant annoncés depuis plus de 20 ans.
-un tracé de la Saône à la Moselle, parallèle au canal des Vosges actuel a été en projet il y a 5 ans, mais resté sans suite... 
- une écluse a même été construite à grands frais dans cet objectif au Nord de Lyon, sur le Rhône amont dans les années 80... elle n'a jamais servie et est à présent inutilisable... 

Un renouveau?
La plus grande partie du réseau fluvial, soit 6 800 km a été confiée par l'État à VNF (Voies navigables de France), établissement public créé en 1991 pour gérer le réseau des voies navigables en France. 
Le patrimoine fluvial géré par VNF comprend 3 800 km de canaux, 2 900 km de fleuves, 419 barrages et 1 602 écluses. VNF et les principaux acteurs en France militent en faveur d'un redéploiement de l'utilisation de la voie d'eau. C'est ainsi que le trafic fluvial de frêt a pour la première fois depuis 40 ans, augmenté de 8% en 2019 en tonnes transportées. 
En 2019 également, un partenariat a été conclu avec EDF au terme duquel EDF s’engage à étudier systématiquement une solution fluviale et/ou fluvio-maritime pour l’ensemble de ses transports, en particulier pour l’acheminement de pièces lourdes, indivisibles et de grandes dimensions, à destination ou en provenance des sites de production, de maintenance ou de distribution d’électricité.


Un moyen de transport de fret bien plus écologique que le transport par camions.
Certes, le transport fluvial utilise à ce jour encore la motorisation diesel qui est certes polluante.
Mais si l'on considère la pollution à la tonne transportée, une péniche de grand gabarit est bien moins polluante que les camions. Une étude comparative menée en 2009 par VNF à l'aide d'un éco-calculateur a démontré qu'en moyenne, un convoi fluvial (2 péniches) transporte 5 000 tonnes, soit autant que 5 trains complets ou 250 camions. En termes de pollution, le convoi par voie fluviale consommerait 3,7 fois moins de carburant classique (diesel) que la route et polluerait quatre fois moins. Voir ici.

Réduire l'impact de la motorisation des péniches de transport
Aujourd'hui, les expérimentations fleurissent en matière de motorisation : l'utilisation du GNL (gaz naturel liquéfié), avec des stations d'approvisionnement des péniches sur les fleuves (alors qu'auparavant, le GNL devait être transporté par camion jusqu'aux ports fluviaux). Mais le GNL, s'il émet moins de GES, est supposé rejeter des particules fines autant qu'un diesel.
Les chercheurs se tournent donc vers les moteurs à hydrogène. En effet, le bateau est le véhicule idéal pour embarquer à la fois le système de production de l'hydrogène (combustible) et la pile à combustible (moteur électrique).  Des expérimentations sont en cours à Birmingham: un moteur diesel avec son réservoir de fuel ont été remplacés par un moteur électrique à haut rendement, une batterie d’accumulateurs électriques pour l’alimentation de pointe et une pile à combustible avec un accumulateur à hydrogène pour recharger les accumulateurs électriques. 
À Paris, avec le programme H2Ships, la même expérimentation est en cours depuis Juillet 2019, menée par le Syctom qui envisage de convertir à l’hydrogène une partie de sa flotte de barges en charge de l’acheminement des déchets sur la Seine. La mise en oeuvre est prévue pour 2022. 
À Lyon, une station de recharge pour moteurs à hydrogène (véhicules légers) est déjà en place dans le port Edouard Herriot.

Les contraintes du transport fluvial, question d'organisation
• Contrainte géographique : Certes une péniche se déplace plus lentement qu'un camion et est contrainte de décharger dans un port.
La contrainte géographique est donc réelle et avec elle le problème des fameux "derniers kilomètres". Cette contrainte est en passe d'être en partie résolue avec l'intermodalité (relier les terminaux portuaires par des voies ferrées et des unités de transport électrique pour l'approvisionnement des villes). Cette intermodalité existe déjà dans les grands ports fluviaux.  Ainsi les villes de  Paris, Lyon, Strasbourg et Lille ont été sélectionnées pour participer au projet de recherche ANR- FLUIDE qui a pour objectif d'organiser l'intermodalité des terminaux des villes arrosées par un fleuve navigable.

• L'autre contrainte est la lenteur : une péniche doit respecter la vitesse maximale de 12 à 20 Km/H  selon les types de voies d'eau utilisés. Mais là aussi, tout est une question de type d'utilisation et d'organisation. Ne comptez pas sur une péniche pour vous livrer votre repas en quelques heures ! Ce type de transport est réservé au frêt encombrant, lourd et non périssable (matériaux, céréales...) et dont la commande prévoit une livraison sur une semaine environ (selon la distance à parcourir).

Cependant, le coût à la tonne transportée étant 4 fois moins élevé que le camion, les logisticiens adeptes du "juste à temps" savent adapter leur planning au temps de transport.


Et la faune des fleuves alors?
Les grands axes fluviaux étant devenus des autoroutes, les hélices de propulsion ne sont pas sans impact sur la faune. Pollution mécanique donc (brassage de l'eau) et sonore pour les poissons, oiseaux et petits mammifères des berges.
À noter que la pollution sonore est peu perceptible par les humains.

En conclusion
Tant qu'il y aura des transports de marchandises, il y aura un impact sur notre environnement. L'idée étant que cet impact soit le plus faible possible. En ce sens, la voie d'eau semble promise à un bel avenir. Encore faut-il la faire connaitre!!


Les sources et bonnes adresses:
VNF: gestionnaire du domaine public fluvial
Eau France: service public d'information sur l'eau
Agir pour le Fluvial : Collectif créé à l’initiative de la Chambre Nationale de la Batellerie Artisanale (CNBA) et de 35 autres associations et syndicats. Objectif : rassembler tous les acteurs de la filière pour plaider la cause du transport fluvial auprès des pouvoirs publics.


 
 
 

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